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9 janvier 2010 6 09 /01 /janvier /2010 05:40

 

Je ne sais pas combien de temps encore tout ça aurait pu durer. Je ne sais pas combien de temps encore j’aurais pu endurer ça. Il fallait que ça cesse.

Les nuits sans sommeil à guetter le moindre bruit indiquant sa venue, la terreur et le dégoût de le savoir dans les parages, mais aussi cette angoisse paradoxale qu’il ne revienne plus et que tout s’arrête ici, lentement, dans l’oubli et la folie derrière cette porte close…

Quel genre de vieux pervers faut-il être pour vouloir se prouver ainsi qu’on est toujours vert ? En quoi aurait-ce été si différent qu’il se paie une pute ? Il lui fallait en plus se prouver qu’il était bien le mâle dominant ? Et pourquoi moi ? Pourquoi ? J’ai été gentille, merde ! Je venais toutes les semaines prendre de ses nouvelles, m’assurer qu’il ne manquait de rien, lui faire un brin de causette. Il avait déjà survécu à la canicule, j’aurais dû me douter que cette vieille carne n’était pas si fragile ! Comment ai-je pu être aussi naïve ? Un homme reste un homme, même cacochyme. Putain de campagne de sensibilisation, tiens ! Et vas-y que je te culpabilise les jeunes qui laissent crever leurs vieux… moi je marche à fond dans ces conneries. C’est même pas mon vieux, ce vieux dégueulasse ! C’est le vieux de personne, d’ailleurs, c’est pour ça que j’ai commencé à venir le voir, ce putain de pauvre vieux tout seul si c’est pas malheureux quand même… j’t’en foutrais !

Sous ses airs de vieille loque tremblotante, je ne me suis pas méfiée, forcément ! Comment il a réussi à me traîner jusque là, ça, ça reste un mystère. Mais ce qui est sûr c’est qu’il ne s’est pas passé une journée depuis sans que ce vieux débris puant vienne s’astiquer et me tripoter et me… Oh ! je vais encore gerber !

Et il me laissait là, dans et le froid et l’humidité, à poil, attachée à ce tuyau, dans ma pisse, ma merde et ma gerbe. Tout fier de lui, content d’avoir réussi une fois de plus à faire sa petite affaire. Vieux salopard ! Pour le nouvel an, il s’est pointé avec une bouteille, le con ! Je préfère essayer de ne jamais repenser à ce qu’il m’a fait avec… Mais au moins a-t-il eu la prétention de croire qu’il m’avait trop épuisée pour craindre quoi que ce soit. Il m’a détaché une main pour trinquer « à nous ». Vieux porc dégénéré. Je n’ai pas réfléchi une seconde, j’ai chopé la bouteille et la lui ai fracassée sur le crâne.

Pas si gaillard le vieux libidineux, finalement : il est mort sur le coup. Cette fois, il devient vert pour de bon. Je le vois même déjà tourner au noir par endroit. Mais j’aurais peut-être dû réfléchir une seconde… Cette vieille ordure est crevée, la porte est grande ouverte, mais je ne sais pas où est passée la clef de ces putain de menottes.

 

 

 

Ecrit pour le défi du samedi « que vous évoque une couleur : le vert. »

 

 

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1 janvier 2010 5 01 /01 /janvier /2010 23:13

 

Aaaaaaaaah… Aaaaaaahaaaaaaaaaaah ! J’ai toujours l’impression de pisser plus que j’bois ! Hé hé !... Aaaaaaah… mais que tu la s’coues ou que tu la… quoi déjà ? Que tu l’astiques ou que tu… nan. Bref. La dernière goutte est pour le split, quoi. Ah non, tiens. Hé hé ! L’est pour la nunette ! Pis pas qu’la dernière ! Vache ! J’en ai mis d’dans quomême ?... Bon, un dernier p’tit verre avant d’aller m’piquer une ronflette… Vaaaala… Merde, j’y ai d’jà bourré l’cul ou non ? J’sais pu… ‘tends voir… j’bande ou pas ?... Ouuuuuh la ! Ben non, hein ! C’est qu’ça doit êt’ fait. Peux roupiller tranquille. Allez… Ah ben t’façon ça tombe bien, elle est pas là. Ben où qu’elle est encore ?... doit être chez sa mère. Elle est toujours chez sa mère. J’crois. Quoique… j’sais pu si elle est pas morte sa mère… pfffrrrrt !

 

***

 

Merde. Je l’ai déjà vu, lui. J’aurais dû aller à l’autre hôpital. Il me regarde bizarrement. Pourvu qu’il ne me pose pas de questions. Une fois j’ai failli craquer… mais je ne veux pas qu’on me l’arrête. Il n’a rien à faire en prison. Il faut juste qu’il se soigne… Il n’est plus vraiment lui dans ces moments-là… Je le sais bien. Dès qu’il arrêtera de boire… tout ça s’arrêtera aussi. Il est tellement… tellement… oh la la, je l’aime, quoi ! Comme une folle… Si je le perds je me perds. Alors je dois l’aider. Autant que je peux… à quel moment on sait qu’on ne peut plus ?... Je crois qu’il m’a recassé le poignet. Je devais être encore un peu fragile. Peut-être que cette fois il s’excusera. Et qu’il m’écoutera. Je sais bien qu’il m’aime aussi. Elle est belle notre histoire. Alors ça va finir par s’arranger. C’est sûr.

 



Ecrit pour le Défi du samedi sur le thème "Ivresse(s) - proposez deux versions de votre texte".



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26 décembre 2009 6 26 /12 /décembre /2009 00:46

Plus le jour J approchait, plus le secret était dur à garder. Sa déception était presque palpable. Il essayait bien de me tirer les vers du nez, mais je ne lâchais rien, au point qu'en effet il pensait obligatoirement qu'il n'y aurait ni fête ni surprise pour son anniversaire. Je m'efforçais de rire sous cape et de rester de marbre lorsqu'il évoquait le sujet. J'avais évidemment tout préparé en catimini et j'étais à peu près sûre de mon effet : tout le monde serait là et la cerise sur le gâteau serait dans le gâteau... Une vieille blague entre nous, ce truc de femme à demi nue dans un gâteau, et j'étais sûre que me voir sortir de sous la chantilly lui ferait un souvenir impérissable !

Je suis allée me cacher dans le dessert en dessous affriolants avec une bouteille, parce que pour faire ça j'avais quand même besoin d'être pompette. En attendant l'heure de mon petit numéro, je tendais l'oreille pour surprendre les conversations et je me félicitais doublement pour mon idée : de fil en aiguille, j'ai appris des trucs pas croyables ! Je buvais du petit lait, mais pas seulement... si bien qu'à un moment j'ai fini par m'endormir et ça ne m'a pas réveillée quand ils ont bougé le gâteau.

Je sais pas si c'est moi qu'ai pas fait attention quand je me suis planquée ou si c'est les autres qu'ont déconné, n'empêche qu'ils ont mis le gâteau à cuire. Et même bourrée, le thermostat 7, ça brûle.

 




Ecrit pour le Défi du samedi sur le thème : « évoquer une surprise réservée à un être cher en utilisant les locutions : rire sous cape – en catimini – être pompette – boire du petit lait – de fil en aiguille. »




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11 décembre 2009 5 11 /12 /décembre /2009 23:39

 

Je suis pas très porté sur les fêtes religieuses. Pas plus sur les fêtes de famille. Faut dire que d’famille j’en ai pas vraiment eu quant à la r’ligion, tout c’que j’en connais c’est les coups d’trique qu’on r’cevait chez les jésuites quand j’étais minot et à part dans l’dos ça m’a pas trop marqué. Mais Noël… j’sais pas. Noël c’est… j’sais pas. J’aime bien les décorations, les lumières partout, l’odeur des sapins… Habituellement, c’est sous une aut’ forme, que j’l’offre à mes clients, l’sapin. Mais à Noël, y m’vient des envies d’générosité et d’grandeur d’âme. J’sais pas pourquoi. En plus, là, la cliente, j’l’ai ramenée comme elle était en sortant du rade où elle bossait, avec sa robe verte, ses collants rouges et son bonnet à grelots. A chaque fois qu’elle bouge la tête, ça fait gling-gling et ça m’donne envie d’chanter « minuit chrétien ». J’sais même pas d’où j’la connais, cette chanson. En attendant, c’est son jour de chance à la donzelle.

-          C’est ton jour de chance.

Elle m’a r’gardé avec l’air de pas m’croire. J’y aurais p’t’êt’ pas cru non plus à sa place. Je m’suis levé et j’ai ouvert la porte de la bicoque. Rien que le noir de la forêt tout autour. Même pas de lune. Ouais… une sacrée chance, qu’elle avait.

-          Ouais, une sacrée chance, que t’as.

C’était l’premier cadeau d’Noël que j’faisais cette année. Rien que quelques mots. Mais un putain d’beau cadeau ! J’ai posé l’flingue, j’l’ai détachée.

-          File. J’te laisse 5 minutes d’avance.

 

Elle a même pas dit merci.

 

 

 

 

Ecrit pour le Défi du samedi : « Tout le monde est assez riche pour offrir des MOTS en cadeau ! Quels MOTS choisiriez-vous ? A qui les offririez-vous ? »

 

 

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5 décembre 2009 6 05 /12 /décembre /2009 06:00

 

la carrière que je souhaite embrasser un jour

a ton regard doux et surtout tes lèvres rondes

je suis sûre d’être absolument faite pour

et d’ailleurs à cet effet je ne suis pas blonde

 

je saurai me montrer inventive ou lascive

entreprenante, réservée ou bien fougueuse

je peux pour te plaire être tendre ou agressive

utile, agréable, très sérieuse ou joueuse

 

je sais aussi sans réserve m’amouracher

aimer avec passion en pleine déraison

m’offrir avec bonheur et n’être plus qu’à toi

 

d’amour et d’eau fraîche je peux me sustenter

faire à chaque collation le plein d’émotions

n’hésite donc pas l’affaire est sûre, prends-moi !

 



Ecrit pour le Défi du samedi : « écrire une lettre de motivation pour un nouveau métier, sans préciser lequel – à deviner par les autres ».



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8 novembre 2009 7 08 /11 /novembre /2009 09:14

 

L’endroit était comme sur les photos : une belle maison ancienne à flanc de coteau, un grand jardin ni trop sauvage ni trop propret, à l’écart de la route et assez loin de tout pour se croire seul au monde… Exactement ce qu’il me fallait pour ces vacances. Le vieux proprio n’en finissait plus de me donner des consignes et, quand il m’a enfin remis les clés, il a dit :

      "Une dernière chose. N’ouvrez pas cette porte. Jamais. En aucune circonstance."

Je ne l’avais même pas remarquée : vieille, envahie de végétation, dans un coin du jardin que je n’aurais sans doute pas eu l’idée d’explorer. Je ne sais pas pourquoi il a fallu qu’il m’en parle. Pour m’interdire d’y aller en plus.

Sur le coup je n’y ai guère prêté attention, mais en me couchant je me suis aperçue que je ne pensais qu’à ça. Que pouvait-il bien y avoir derrière cette fichue porte ?

Evidemment, je me suis imaginé un tas de choses : une chambre de tortures, la planque diurne d’un vampire, un équipement complet de sex toys, une collection de cadavres, une geôle puante où le vieux aurait séquestré des jeunes-femmes, … les trucs classiques, quoi.

J’ai super mal dormi.

Le lendemain, j’ai collé mon oreille à la porte. Rien. Pas de hurlements de loup-garou ou d’enfants violentés, pas de grognements de chien à trois têtes, pas de pleurs de femme violée, aucun bruit louche, en somme. Pas d’odeur pestilentielle non plus trahissant l’éventuelle présence d’un ou plusieurs corps en putréfaction.

Ça m’agaçait. Pire : ça m’obsédait déjà. J’ai essayé de me convaincre que ce n’était qu’une cave à vin et que le vieux avait juste peur que je lui descende ses meilleures bouteilles, mais rien n’y faisait. J’avais besoin de savoir.

Le jour suivant, je suis allée frapper à la porte. Après tout, hein… Un vieil ermite oublié, un bâtard difforme caché… mais non. Non plus. Ou alors sourds. Ou asociaux. J’ai frappé assez fort et assez longtemps pour réveiller un mort et personne n’a ouvert.

Oh ! et puis après tout, qu’est-ce que ça pouvait bien foutre si je l’ouvrais, cette satanée porte ? C’est vrai, quoi, merde…

J’ai fouillé toute la maison en quête d’une clé, sans succès. Evidemment.

Le jour suivant je suis retournée devant la porte. J’ai essayé de l’ouvrir. Elle n’était pas verrouillée… Oui. J’aurais pu essayer ça avant de retourner la baraque. Bien sûr. Et la porte, LA porte, cette putain de saloperie de porte de mes deux qui m’avait déjà gâché mes premiers jours de vacances était donc ouverte. Des jours à me demander ce qu’il pouvait bien y avoir derrière et là… je n’osais pas entrer. Le vieux était peut-être un sorcier maléfique qui me jetterait un sort affreux si jamais je désobéissais ? J’ai jeté un œil alentour pour vérifier qu’il n’y avait personne. Personne. Alors comment le saurait-il, le vieux, si j’entrais ? Parce qu’il était sorcier. Oui. Bon…

Quelque chose – la mauvaise conscience ? – m’empêchait d’entrer malgré tout. J’ai dû rester pas loin d’une éternité devant cette porte entrouverte et d’un coup, je sais pas… j’ai flippé. Toutes les conneries que j’avais imaginées, là… alors je me suis précipitée dans la maison et j’ai sorti les clés de ma poche pour m’enfermer à l’intérieur. C’est là que je l’ai vue. Bêtement sur le trousseau que m’avait filé le vieux. Une belle grosse clé bien rouillée, exactement comme celle que j’espérais trouver. Alors j’ai pris mon courage à deux mains et je suis retournée devant la porte. J’ai essayé la clé et c’était bien la bonne. J’ai fermé cette foutue porte à double tour sur son putain de mystère et je suis retournée quant à moi m’enfermer dans la maison. A compter de ce jour je me suis mise à entendre des bruits étranges en provenance de la porte… Je n’y ai pas tenu : foutues pour foutues, j’ai passé la fin de mes vacances chez moi à me gaver d’antidépresseurs. Cette histoire m’avait rendue dingue.

A la fin de l’été, je suis juste retournée rendre ses clés au vieux, mais j’ai même pas voulu approcher de la maison. Quand il m’a demandé, avec un sourire en coin et un clin d’œil complice, si j’avais mis longtemps à l’ouvrir, la porte, j’ai juste fait « hin hin » et je me suis barrée loin de lui, de son trou et de cette histoire à la con qui n’en était même pas une.

 

Quand, quelques mois plus tard, on a retrouvé derrière cette porte les restes de mes amis et du buffet qu’ils avaient préparé pour me faire une surprise pour mon anniversaire, je me suis sentie con.

 

 

 

Ecrit pour le défi du samedi : « Un secret bien gardé se cache derrière cette porte ».

 

 

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16 octobre 2009 5 16 /10 /octobre /2009 23:59

Sophie la chipie se trouvait fort jolie.

Elle aimait les confiseries et faire des plaisanteries, la petite souris et écouter des poésies. De sa maman elle était la princesse chérie.

 

François le bêta se trouvait trop gras.

Il aimait le chocolat et les fraises tagada, la galette des rois et croquer du nougat. De son papa il était le petit bouddha.

 

Sophie la chipie, à l’école et le mercredi, aimait qu’on la trouve trop mimi, qu’on la gâte à l’infini et elle ne disait pas merci.

 

François le bêta, dans la cour et pendant le repas, aimait qu’on ne le voie pas, qu’on ne l’entende pas et que Sophie soit là.

 

Sophie n’aimait pas François, mais François aimait Sophie. Alors François le bêta lui donnait ses langues de chat, ses bonbons qui collent pas et faisait ses devoirs parfois. Sophie la chipie se moquait de lui, disait qu’il faisait pipi au lit et qu’il était bête comme un salsifis.

 

Un jour de crise de foie, à cause d’un gâteau aux noix offert par François, Sophie a vomi son repas de midi et elle s’est salie. Elle fit tout un plat, accusa François, qui soudain pleura et dit dans un cri « depuis tout petit je t’aime ma Sophie ». Sophie le moqua et François rougit.

 

La maîtresse gronda et elle expliqua qu’on ne moque pas les plus gros que soi. Sophie n’a rien dit, a été  punie et elle a souri d’un sourire gentil. François le bêta s’est dit « cette fois elle m’aime je le vois ! ». Il lui proposa une sucette au choix et elle lui dit « tu es trop gentil ».

 

Puis elle raconta par-ci et par-là qu’il faisait caca la nuit dans ses draps.

 

 

 

 

 

Ecrit pour le Défi du samedi sur la consigne : « Ecrire le texte permettant à un enfant de répondre aux questions suivantes » :

1)      Qu’est-il arrivé à Sophie ?

2)      Pourquoi pareille mésaventure lui arrive-t-elle ?

3)      Quelles qualités lui manquent encore ?

4)      Comment nommer l’attitude de François ?

5)      Que prouve la dernière phrase ?

 

 

 

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8 octobre 2009 4 08 /10 /octobre /2009 00:00

La légèreté de ton pas, à celui du diplodocus pareil, m’arrache immanquablement à mes songes quand, enfin, au milieu de la nuit, tu vas te brosser les dents. Le bruit de ton urine directement dans le fond de la cuvette, que j’entends par la porte que tu laisses soigneusement ouverte - ce même bruit qui te fait dire « tu vois bien qu’c’est pas moi qu’en mets partout ! je vise direct au fond ! » - m’agace toujours au plus haut point. La porte de la chambre que tu n’as toujours pas réussi à fermer sans la faire claquer ne manque pas de me faire sursauter. Et pour finir cette façon que tu as, invariablement, de toussoter, te racler la gorge et te moucher sitôt que tu t’allonges près de moi achève de me tirer du sommeil dans lequel il m’est pourtant toujours tellement difficile de plonger.

 

Mais si tu pouvais seulement imaginer comme j’aime entendre ton souffle qui ralentit pour devenir ronflement… parce quand je l’entends, amour, ça veut dire que tu es là, tout près de moi, apaisé, enfin.

 



Ecrit pour le Défi du samedi sur le thème "les bruits de la nuit", avec pour contrainte d'utiliser le mot "diplodocus".


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25 septembre 2009 5 25 /09 /septembre /2009 23:35

 

Assez paradoxalement, je ne me suis jamais senti plus utile que depuis que je suis ici, sur cette étagère poussiéreuse dans l’obscurité d’une cave humide.

 

Il faut dire qu’avant d’être arraché à mon milieu naturel et entreposé ainsi, j’étais affreusement seul. J’évoluais dans un environnement froid et sans surprise. Si la possibilité m’en avait été donnée, je n’aurais ressenti que douleur, regrets, remords et frustration. Mais même ça m’était interdit. J’étais ignoré, étouffé, relégué à un rôle très secondaire et purement mécanique.

 

Mais avec elle tout a changé. Avant même qu’elle ne s’empare enfin de moi, je sentais bien déjà qu’elle cherchait à toutes forces à me donner l’âme qu’il m’avait volée, la beauté qu’il m’interdisait, la place qui me revenait. Elle s’est confiée et offerte à moi bien avant de me posséder. C’était insupportable pour moi de ne pouvoir lui témoigner en retour ne serait-ce que ma gratitude, à défaut d’un amour égal au sien. Tout ça à cause de lui, qui restait désespérément incapable de me laisser m’exprimer et de m’entendre.

 

Jusqu’au jour où enfin elle m’a arraché à son emprise. Elle s’est alors occupée de moi avec soin, apaisée de pouvoir m’aimer comme elle l’entendait, sans avoir plus à se trouver confrontée à la froideur et l’incompréhension de mon ancien propriétaire.

 

Pour moi, ce fut une libération. D’autres m’ont rejoint sur cette étagère depuis et chaque nouvel arrivant est l’occasion de ce que j’appelle la cérémonie. Elle est toujours très agitée, troublée, nerveuse quand elle prépare le nouveau en silence. Une fois prêt, elle nous descend tous de l’étagère, qu’elle nettoie soigneusement. Elle lave ensuite un à un nos bocaux et c’est là qu’elle commence à se calmer en nous parlant. Elle se confie à mesure qu’elle nous repose sur nos rayons, propres, brillants et plus beaux de cet amour qu’elle nous donne.

 

Nous lui répondons, elle sait nous entendre et lorsque le dernier a trouvé sa place, elle semble enfin sereine et rassurée.

 

C’est beau une femme qui écoute son cœur. Elle, qui écoute non seulement le sien, mais aussi tous ceux qu’elle conserve précieusement ici, resplendit littéralement.

 

 

 

Ecrit pour le Défi du samedi sur le thème : « Objets inanimés, avez-vous donc une âme ? Faire parler un ou plusieurs objets familiers. »

 

 

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12 septembre 2009 6 12 /09 /septembre /2009 00:17

 

Après des années d’heures trop longues et de temps qui s’étire, les minutes et les secondes semblent maintenant me filer entre les doigts.

Une heure.

Rien qu’une heure pour savourer ce repas que j’ai mis tellement de temps à choisir. J’ai envie de laisser chaque bouchée fondre sans mâcher et imprégner mes papilles de ses parfums délicats, mais j’ai peur de ne pas avoir le temps de finir mon assiette si je m’en délecte trop lentement.

Une heure.

Je devrais sans doute m’attarder sur des considérations plus… profondes ? intelligentes ? symboliques ? Mais mon esprit tout entier est concentré sur l’explosion de saveurs dans ma bouche.

Et pour ce que ça changerait…

Ne pas gâcher ma dernière gorgée de vin à me perdre en réflexions fumeuses. Il est trop tard. Juste le temps de boire mon café avant d’y aller.

A quelques kilomètres près, j’aurais été jugé au Nouveau-Mexique et non au Texas.

La vie tient parfois à peu de choses.




Ecrit pour le Défi du samedi : "L'heure la plus courte d'une vie".
 




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