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4 septembre 2009 5 04 /09 /septembre /2009 01:11

 

-  Mais bien sûr que je comprends, Caroline, enfin…

-  Non, parce que la dernière fois que je suis venue pleurer à cause de lui, c’était en le traitant de salaud !

-  Ben oui, mais avant qu’il se comporte comme ça, tu l’as aimé…

-  Oui… et puis bon, quelqu’un qu’on connait, assassiné, comme ça… ça fait un choc, tu sais, Marie.

-  Je veux bien te croire ! Même moi, hein, je ne le connaissais pas vraiment, mais ça me fait tout drôle aussi.

 

Et le pire, c’est que c’était vrai. Comme si d’apprendre sa mort par quelqu’un d’autre avait effacé ce que j’avais fait. J’étais sincèrement choquée. Et encore plus sincèrement compatissante. Quelle connerie ! Plus jamais, jamais quelqu’un que je connaissais. Même indirectement.

 

-  Et tu sais que la police m’a interrogée ?

-  Non ?! Ils te soupçonnent ?

-  Pas vraiment, non. De toute façon j’étais pas là, j’étais en week-end, mais bon… ils ont vérifié quand même.

-  Vache !

-  Comme tu dis !

-  Ils t’ont demandé d’autres trucs ?

-  Ben ouais, des trucs du genre « est-ce qu’il avait des ennemis », tout ça… j’ai pas dû les aider beaucoup. Ils pensent que c’est un homme qui l’a tué.

-  Ah ?

-  Ouais, ils disent que les femmes, ça tue pas comme ça.

-  Pas comment ?

-  Avec un tel sang-froid. Ils disent que les femmes, c’est toujours passionnel. Que là, ça ressemble à un meurtre de hasard, un rôdeur…

-  Ah bon…

-  Ouais.

-  Je te ressers un verre ?

-  Oh oui ! Putain, je commençais tout juste à me remettre du divorce…

-  T’en fais pas, ça ira… Tu es sous le choc, c’est normal, mais tu verras, tu surmonteras ça aussi. Et puis t’es pas toute seule, hein, tu sais que tu peux compter sur les copines !

-  Ouais, une chance… toi d’ailleurs t’as l’air d’aller vachement mieux depuis quelques temps… t’as dégoté un super psy ou quoi ?!

-  Hé hé… non. Mais c’est vrai que je reprends du poil de la bête, oui…

-  C’est bien. Tant mieux. Allez : à la tienne, Marie !

-  A la tienne, Caroline.

 

***

 

Cette histoire m’avait fichu un coup. Caroline semblait assez bien s’en remettre – après tout c’était le salaud qui lui avait valu des mois d’antidépresseurs et des années de thérapie – mais je n’arrivais pas à m’enlever de l’idée que j’avais mal agi. Sans compter le risque que j’avais pris. J’avais été extrêmement négligente, inconséquente et stupide.

J’essayais malgré tout de ne plus y penser.

Depuis Didier, j’avais pris la résolution ferme de ne plus jamais, jamais laisser un homme me faire souffrir, alors je n’allais quand même pas me laisser abattre par un cadavre ?

Bon sang, Didier… et voilà, il fallait que j’y repense… Des mois à me vider la tête de centaines de souvenirs, des mois pour ne plus pleurer chaque soir en pensant à lui, des mois avant de pouvoir revivre presque normalement, et voilà que tout me revenait d’un coup, brutalement, le bon comme le mauvais. Le bon, surtout. Le plus douloureux.

 

Qu’est-ce que j’ai pu l’aimer, Didier… Et d’une certaine manière, je crois que je l’aimerai toujours. Il était tellement tout ce dont j’avais toujours rêvé… Il était exactement l’homme que je voulais aimer. Et l’homme dont je voulais être aimée. Alors je lui ai tout donné… mon amour, mon corps, ma confiance, ma vie, mon fric, mes clés... tout. Et je ne l’ai jamais regretté. Il a été et restera ma plus belle histoire d’amour. Ma seule vraie belle histoire d’amour. Alors ça valait bien le coup. Et puis c’est moi qui l’ai quitté…

Il m’a fait accepter l’inacceptable. Une fois, deux fois, trois… jusqu’au jour où j’ai dit que c’était la dernière fois. Il a pleuré, demandé pardon. J’ai pleuré, pardonné. Il a promis. Et il a recommencé. Alors quel autre choix est-ce que j’avais ?

Entre souffrir sans lui ou souffrir encore avec lui, j’ai choisi la souffrance qui épargnait ma fierté. Et j’ai sans doute bien fait parce qu’il n’a jamais cherché ni à me retenir, ni à me récupérer par la suite. Je n’ai plus jamais eu de nouvelles. Et je n’en ai plus jamais demandé.

J’ai juste décidé que plus un homme ne me ferait pleurer à l’avenir, mais voilà qu’à seulement repenser à lui je commençais à sangloter…

 

Hors de question que ça recommence ! Je ne pouvais plus vivre comme ça, impossible, j’avais perdu assez de temps, de poids, d’énergie en chagrin d’amour pour au moins deux vies déjà. Il fallait que je me reprenne tout de suite.

J’ai mis des gants et des fringues dans un sac et je suis partie chercher un remontant. Cette fois, je n’ai pas fait la difficile. Il n’était pas question de me faire sauter ce soir, seulement d’évacuer un trop plein d’émotion. Le premier qui m’a offert à boire, je ne lui ai même pas laissé le temps de passer commande à la serveuse, je lui ai directement proposé d’aller chez lui. Ce qu’il a accepté sans hésiter. Les hommes se croient tellement irrésistibles… Ce serait drôle si ce n’était pas si pathétique.

 

J’ai sorti mes gants pendant qu’il ouvrait la porte. Il s’en est étonné. Je lui ai promis qu’il adorerait. Ce con a eu une érection instantanément. On est entré. Je lui ai demandé où était la cuisine. Je lui ai dit de s’installer au salon et de fermer les yeux. Il l’a fait. Les hommes ne doutent de rien, quand même.

A la cuisine, j’ai vite trouvé mon bonheur… J’étais tombée sur un célibataire cette fois. L’évier débordait de vaisselle sale et je n’ai eu aucun besoin de fouiller pour trouver un grand couteau. Il avait toujours les yeux fermés. Il a demandé ce que je mijotais. J’ai répondu « surprise » et lui ai planté la lame dans le ventre. La première fois il a ouvert grand les yeux et les a posés sur moi avec un air de totale incompréhension. Quand j’ai retiré la lame pour la planter une seconde fois il a tourné son regard vers la tâche sombre qui s’agrandissait sur sa chemise.

Pas besoin de nettoyage cette fois-ci. Je n’avais même pas sali mon tee-shirt. Je suis repartie sans traîner. Je me sentais mieux.

 

***


Suite et fin



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commentaires

S
et un accordéon à la place de la guitare ?<br /> pas de soucis, c'est kif-kif !<br /> (par contre ça marche si j'envoie mon frère à la place ?)
Répondre
P
<br /> top là.<br /> j'envoie ma soeur alors.<br /> <br /> <br />
S
pour me rendre compte, faudrait que je la voie en concert sur un parking de Super U...
Répondre
P
<br /> est-ce que ça peut marcher avec un monoprix et un vieux jean à la place du survêt' ?<br /> <br /> <br />
S
elle a l'air casse-couilles, la voisine. Fais moi penser à ne jamais me la présenter!
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P
<br /> <br /> trop con : elle avait super kiffé ta photo et elle ressemble à PJ Harvey mais en plus près d'ici... dommage.<br /> <br /> <br /> <br />

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