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24 août 2009 1 24 /08 /août /2009 00:15


Comme je suis en vacances, écrasée comme une merde allongée lascivement sur un transat, un verre de punch d'eau fraîche dans une main, un bon polar "la critique de la raison pure" dans l'autre, je ne suis pas là pour lire vos commentaires acerbes encourageants et inutiles constructifs, alors je m'autorise, pendant que j'ai le dos tourné, la publication d'une œuvre majeure petite nouvelle en 6 épisodes. Pendant ce temps, je vais faire trempette.

 


 

 


Il ne se passe pas un jour sans que je m’étonne d’en être arrivée là.

J’ai beau savoir comment les choses se sont enchaînées et comment j’ai fait les choix qui m’ont conduite à tout ça, je me demande toujours à quel moment j’aurais pu faire autrement. Ce qui est fait est fait, mais si je comprenais, je pourrais peut-être faire moins d’erreurs à l’avenir.

L’avenir… est-ce que j’en ai seulement un ?

Parfois je me dis que les gens avaient raison, que je n’en avais aucun dès le départ… Sûr, j’aurais pu avoir plus de chance… mais j’aurais aussi pu faire moins de conneries.

J’avais pas 17 ans quand j’ai quitté le trou dans lequel j’avais tant bien que mal réussi à grandir… Je connaissais de la vie ce qu’en disaient les soulards du rade où j’étais serveuse depuis que j’étais assez grande pour porter un plateau chargé de choppes de bière sans tout foutre par terre. De l’amour, je connaissais l’arrière des voitures des représentants de commerce de passage et les meules de foin où m’emmenaient les garçons de ferme qui venaient pour les moissons.

J’avais pas d’idée précise en tête… mais un jour où j’en ai eu ma claque de me faire pincer les miches par ces péquenots avec leurs mains comme des battoirs, j’ai rendu mon tablier et j’ai pris un billet de car pour aller faire ma vie en ville.

Je ne sais pas si ma mère a compris quand je lui ai dit au revoir. Faut dire qu’avant 15 heures, elle avait la gueule de bois et après elle était ivre, alors c’était dur de capter son attention. Je crois qu’on s’en foutait toutes les deux de toute façon. Quant à mon père… je n’ai jamais trop bien su qui c’était. Lui non plus, si ça se trouve… Puis s’il savait, moi j’ai jamais essayé de disparaître et lui n’a apparemment jamais cherché à me retrouver.

 

Quand je suis descendue du car, je me suis sentie étourdie par le bruit, le monde, l’agitation… j’y étais. Ma vraie vie allait commencer.

Avec le peu d’argent qu’il me restait je me suis payé une chambre dans un petit hôtel, crasse mais bon marché. J’ai dû payer d’avance pour la semaine. Alors je n’ai pas traîné et j’ai tout de suite commencé à chercher du travail pour ne pas me retrouver à la rue huit jours plus tard… mais les choses étaient sacrément différentes ici. Déjà, des filles comme moi qui cherchaient un petit boulot dans les bars et les boites, y en avait des tas. Et puis une fois sur deux ils s’en foutaient que je sache prendre jusqu’à dix commandes sans rien noter et que je puisse porter deux plateaux chargés en même temps sans rien renverser… ils prenaient juste la plus jolie. Moi j’étais pas vilaine, hein, mais avec ma garde-robe de fille de la campagne… J’ai fini par trouver une place quand même dans un petit troquet cradingue, fréquenté par les vieux et les paumés du quartier… c’était loin de l’hôtel et encore plus loin du centre-ville, mais j’avais pas les moyens de faire la difficile. Et le patron était gentil. Mon salaire payait juste la chambre, les tickets de bus et deux repas par jour, jusqu’au jour où la nièce du patron a eu besoin d’un travail. Je pouvais pas vraiment lui en vouloir, surtout qu’il m’a donné de quoi payer la semaine suivante à l’hôtel, mais je me retrouvais quand même dans un sacré pétrin. J’ai pas retrouvé de travail assez vite et je me suis fait virer de l’hôtel.

 

J’ai passé une nuit dehors, près de la gare routière, et là on m’a indiqué un foyer où je pourrais me faire héberger le temps de me tirer de ce mauvais pas… j’y suis allée. Les gens qui s’en occupaient étaient gentils et de bonne volonté, ça, on peut pas dire. Ils m’ont donné à manger et un lit dans un genre de dortoir puant. Les femmes qui étaient là étaient toutes plus âgées et abîmées que moi. C’était elles qui puaient. Y en a qu’avaient plus de dents. Y en a une qui s’est pissé dessus. Une autre semblait psalmodier, même si ce qu’elle disait était incompréhensible… ça m’a foutu une de ces trouilles !

La première nuit, j’ai pas fermé l’œil. J’ai bien été obligée d’y retourner quand même… la deuxième nuit je me suis fait piquer mes affaires. Toutes mes affaires. Il ne me restait que les fringues dans lesquelles je m’étais couchée. La troisième nuit, comme il y avait à peu près les mêmes bonnes femmes que la veille, j’ai demandé laquelle avait piqué mon sac et là elles se sont presque toutes jetées sur moi et m’ont foutu une trempe. J’ai cru mourir. J’ai voulu mourir. A la place je suis partie. Je me suis retrouvée sur le trottoir, la gueule en sang, il faisait nuit et froid et je n’avais plus rien. Je suis allée me planquer quelques rues plus loin entre deux poubelles en attendant le jour. Au matin, j’ai zoné des heures, sans savoir où aller et que faire. J’aurais sans doute pu crever dans un caniveau si j’avais pas perdu connaissance sous les yeux d’une bonne âme qui m’a emmenée dans un dispensaire. Là, on m’a remise à peu près sur pieds et on m’a donné l’adresse d’un endroit où on me fournirait des fringues, à manger et peut-être un coup de main. J’ai eu les fringues et la bouffe mais pour le coup de main… j’ai été un peu découragée par la foule de gens qui paraissaient encore plus désespérés et qui semblaient en avoir plus besoin que moi. Alors j’ai renoncé. Je suis ressortie de là avec quelques fringues correctes, deux boites de conserve, un pot de compote et un paquet de sucre.

 

 

à suivre...




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commentaires

M
Comme j'attends la suite je ne mets pas de commentaire.
Répondre
P
<br /> ok.<br /> ben je réponds pas alors.<br /> <br /> <br />

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